Quand un catholique rencontre un protestant, c’est souvent le premier sujet de conversation. Il vouvrait bien connaître les différences. La plupart du temps, chacun sera rassuré par les réponses et se sentira conforté dans sa position, celle de celui qui est dans la bonne Église. Parfois, l’un des deux lancera : “Après tout, c’est la même chose, nous avons le même Dieu !” Et l’autre confirmera, même s’il n’a pas tout à fait le même sentiment…
Quel style de réponse vais-je donner ?
En cherchant sur internet, on trouve vite des tas de réponses. Dès les premières lignes, on comprend l’intention de l’auteur. Certains sont provocateurs, d’autres sont arrogants, d’autres sont respectueux. J’aimerais essayer d’être respectueux, honnête et amical. De plus, je n’ai pas envie de rentrer dans de multiples détails. Je vais donner quelques éléments en tâchant d’expliquer pourquoi je crois ce que je crois.
Autre précision : vous savez sans doute qu’il y a diverses catégories de protestants. Je n’aurai pas la prétention de répondre en leur nom à tous. Je suis pasteur protestant baptiste. Pourtant, je n’aurai pas non plus la prétention de répondre au nom de tous les baptistes. Cette réponse est donc la mienne.
Autorité du pape ou autorité de la Bible ?
Les catholiques croient en l’autorité de la Bible et en l’autorité du pape (et des évêques). Les protestants ne croient qu’en l’autorité de la Bible. Les catholiques acceptent aussi la Tradition catholique. Pour eux, la Tradition est la révélation continue de l’Evangile du Christ à son Eglise, par le Saint-Esprit. Ainsi, même quand un dogme n’a aucun appui biblique, les catholiques peuvent le croire. Par exemple, ils peuvent croire à la doctrine de l’Immaculée Conception (qui date de 1854) et à l’Assomption de Marie (qui date de 1950). Quand ces dogmes ont été prononcés, déclarés et définis, ils l’ont été sur la base de témoignages recueillis au cours des siècles. Les protestants refusent ces dogmes car ils n’ont pas d’appuis bibliques.
Néanmoins, les protestants ne sont pas toujours en opposition avec ce que dit le pape. Nous apprécions même certains de ses discours, ses rappels à vivre l’évangile et à annoncer le nom de Jésus, ses encouragements à l’amour, etc. Cependant, nous ne lui reconnaissons pas d’autorité sur nous. Nous voulons plaire à Dieu, et nous tâchons d’obéir à sa Parole, la Bible.
La place de Marie, mère de Jésus
Tout comme les catholiques, nous croyons que Marie est la mère de Jésus, qu’elle a été enceinte par la vertu du Saint-Esprit et que Joseph n’y est pour rien. Par contre, nous ne croyons pas comme les catholiques que Marie soit née préservée du péché originel en vertu d’une grâce exceptionnelle. Ce dogme de l’Immaculée Conception a été prononcé par le pape Pie IX en 1854. Pour nous, ce dogme n’est pas dans la Bible, donc nous ne le retenons pas. Nous pensons plutôt que “Tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu ; et ils sont gratuitement justifiés par sa grâce, par le moyen de la rédemption qui est en Jésus-Christ.” (Romains 3.23-24). Nous pensons que Marie partage notre condition de pécheurs. D’ailleurs, quand l’ange Gabriel lui annonce qu’elle mettra au monde Jésus, elle chante “Mon esprit se réjouit en Dieu, mon sauveur.” (Luc 1.47). Nous croyons que Marie appelle Dieu son sauveur parce qu’elle a besoin d’un sauveur. Et si elle a besoin d’un sauveur, c’est qu’elle a besoin d’être sauvée, tout comme nous. Et si elle a besoin d’être sauvée, c’est qu’elle n’a pas été préservée du péché.
Les protestants ne croient pas non plus que Marie ait été enlevée au ciel après sa mort par l’effet d’une grâce spéciale. Ce dogme de l’Assomption a été défini en 1950 par le pape Pie XII. Nous préférons nous en tenir à ce que dit la Bible. Et comme elle ne dit rien à propos de l’enlèvement de Marie, nous n’y croyons pas et nous ne pouvons pas fêter cet événement qui n’a pas eu lieu selon nous.
Les catholiques (pas tous) prient Marie. Je sais qu’il y a une subtilité de langage. Certains disent qu’ils ne prient pas Marie et qu’ils ne l’adorent pas (car on adore Dieu seul) mais qu’ils la vénèrent. Les protestants ne prient pas Marie, ils ne l’adorent pas, ils ne la vénèrent pas et ils ne lui parlent pas du tout. Ils peuvent parler d’elle, tout comme ils parlent de l’apôtre Paul, de l’apôtre Pierre, de Moïse, de Jérémie, etc. Mais ils ne parlent pas à ces personnages bibliques. L’apôtre Paul a écrit : “Car il y a un seul Dieu, et aussi un seul médiateur entre Dieu et les hommes, Jésus-Christ homme.” (1 Timothée 2.5). Nous ne trouvons aucune trace de prière à Marie dans la Bible. Quand elle était vivante, les gens lui parlaient. Mais après sa mort, la Bible ne parle plus d’elle. Les disciples de Jésus continuent d’annoncer la bonne nouvelle et prêchent le nom de Jésus. Ils baptisent au nom de Jésus. Ils prient et invoquent Jésus, même après sa mort et sa résurrection. Les protestants ne demandent pas à Marie d’intercéder auprès de Jésus. Ils intercèdent eux-mêmes directement auprès de Jésus.
Le purgatoire
Nous ne croyons pas non plus à la doctrine du purgatoire, ce lieu qui permettrait de purifier les âmes mortes en état de grâce mais non encore entièrement purifiées des conséquences de leurs péchés. Pour nous, c’est maintenant que tout se joue : ou nous acceptons le Seigneur par la foi et nous irons près de lui, ou nous le rejetons et nous serons aussi rejetés par lui. Après la mort, c’est trop tard ! Le Seigneur purifie ceux qui se repentent de leurs péchés et l’acceptent par la foi en Jésus-Christ. Leurs péchés sont effacés, dès à présent. L’apôtre Paul, ayant rappelé aux Corinthiens certains péchés qu’ils avaient commis par le passé, les rassure sur leur condition actuelle : “Mais vous avez été lavés, mais vous avez été sanctifiés, mais vous avez été justifiés au nom du Seigneur Jésus-Christ, et par l’Esprit de notre Dieu.” (1 Corinthiens 6.11). Nous croyons qu’être lavé, sanctifié et justifié (et on trouve aussi ailleurs “purifié”) suffit largement, et qu’il n’est pas nécessaire d’être encore purifié après la mort.
La prière pour les morts
Nous ne voyons pas d’exemple de prière pour les morts dans la Bible. Donc nous ne prions pas pour les morts. Ah si ! J’oubliais… La Bible nous raconte bien des exemples de prière pour les morts. Mais il faut préciser : il s’agit de prière pour des personnes qui viennent de mourir, et cette prière vise leur résurrection immédiate. Par exemple, Jésus a prié pour son ami Lazare qui était mort depuis quatre jours. Il a prié et Lazare est ressuscité.
L’Eglise catholique célèbre des messes pour les défunts. A cette occasion, des prières sont faites pour les morts, certainement pour que Dieu les accueille, qu’il ait pitié d’eux et écourte leur temps au purgatoire. Nous ne célébrons pas ce genre de messe car nous n’en voyons pas d’exemple dans la Bible et parce que nous ne croyons pas non plus au purgatoire.
La prière aux saints
Les catholiques (pas tous) prient les saints pour leur demander de l’assistance et du secours. Les protestants ne le font pas. Plus, ils sont vraiment réticents à cela. La raison vient de la Bible. En Deutéronome 18.11, Dieu demande qu’il n’y ait “personne qui interroge les morts”. Pour nous, les saints qui sont priés sont morts. Il ne faut donc pas leur parler, ni les prier, ni leur demander de nous protéger. Nous prions Dieu seul, au nom de Jésus, mais pas au nom d’un saint.
Pour l’Eglise catholique, les saints sont des personnes qui ont eu une vie de foi remarquable. Je ne connais pas exactement les critères de reconnaissance, mais je sais que seules quelques personnes sont reconnues saintes. Pour les protestants, sont saints ceux qui acceptent le Seigneur et vivent en conformité avec l’évangile. Pour être plus clair, nous croyons que tout vrai chrétien doit être un disciple de Jésus et est par conséquence un saint. Mais attention à la signification de ce mot ! Pour nous, saint ne veut pas dire parfait et sans péché. Celui qui est saint est celui qui est mis à part pour Dieu. Je vous encourage à lire la Bible pour voir que le mot “saint” est utilisé pour parler des chrétiens. Voici juste quelques références : Actes 9.13, Actes 9.32, Actes 26.10, Romains 8.27 (qui dit que le Saint-Esprit intercède en faveur des saints). Précisons encore que les saints doivent vivre dans la sainteté. Le fait d’être appelé saint est une grâce qui vient de Dieu. Il faut cependant marcher dans la sainteté, rejeter le péché pour demeurer saint.
Conclusion
Comme vous avez pu le constater, il y a des différences entre catholiques et protestants. D’ailleurs il y a aussi des différences entre les différentes Eglises protestantes : les réformés, les luthériens, les baptistes, les pentecôtistes, etc. Nous n’avons pas que des différences dogmatiques. Nous avons aussi d’autres différences : la spiritualité, la manière de nous exprimer, la manière de prier, les chants, l’architecture de nos lieux de culte, la manière de prêcher…
Voilà ! J’ai répondu à la question. Bien sûr, on pourrait continuer à parler de nos différences, ou chercher à trouver tous les points communs. Mais selon moi, l’essentiel n’est pas là.
Stéphane POLEGATO
Pasteur de l’Eglise Protestante Baptiste de Joinville-le-Pont
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